29 Jan 2018

RE 2018, RE 2020, RBR 2020, label Énergie Carbone… De nombreux termes commencent à fleurir dans la presse et sur internet, au sujet de la réglementation qui succèdera à la RT 2012. Mais qu’en est-il exactement ?

Nous avons demandé à Gilles Guyot de l’agence POUGET Consultants, spécialisée dans la construction durable, d’esquisser les grandes lignes (critères, appellations, calendrier, avantages…) de ce qui se profile dans les mois à venir comme à l’horizon 2020.

Avons-nous déjà une idée du contenu de la prochaine norme sur les bâtiments neufs ?
Les grandes lignes en ont été données à l’été 2016 avec le lancement du label E+C- (Énergie Carbone), ainsi que l’expérimentation des bâtiments à Énergie Positive (BEPOS) et Réduction Carbone. Ces deux démarches parallèles et complémentaires ont un même objectif : préparer la future Réglementation Énergétique et Environnementale du bâtiment, en impliquant tous les acteurs pour ne laisser personne sur la touche.

Pour quand est-elle prévue ?
Personne n’est aujourd’hui capable de donner une date précise mais si l’on se base sur les directives nationales et européennes, on peut tabler sur une entrée en vigueur progressive à partir de 2018 en vue d’une généralisation en 2020.
Par ailleurs, plus d’un an semble nécessaire pour que la période d’expérimentation du labelE+Csoit efficace. Les pouvoirs publics l’ont bien compris et vont s’octroyer ce laps de temps pour mettre en place correctement cette étape réglementaire historique. Quoi qu’il en soit à ce jour, tout maître d’ouvrage (public, privé, territoire, collectivité…) volontaire peut participer à l’expérimentation (1ère mondiale).

Quid de la RBR 2020 dont on entend beaucoup parler ?
RBR signifie Réflexion Bâtiment Responsable, et non pas Réglementation Bâtiment Responsable comme cela est souvent interprété. Cette précision est importante car elle signifie que la RBR 2020 ne pilote pas la mise en place de la future réglementation.
Il s’agit en effet d’un groupe de réflexion issu du Plan Bâtiment Durable, qui a pour ambition de diffuser l’information, alimenter les réflexions, faire le lien entre les différents acteurs et les pouvoirs publics.
La prochaine réglementation RE 2018 ou RE 2020 commandée par les pouvoirs publics, sera en fait le fruit du travail réalisé par les associations HQE-France GBC, Effinergie et BBCA qui ont façonné ensemble le cadre technique du label E+C- depuis plusieurs mois.

Quelles sont donc les grandes lignes du label E+ C- ?
L’enjeu est assez clair : généraliser les bâtiments à énergie positive et à faible empreinte carbone, à travers l’analyse du bâtiment tout au long de son cycle de vie (ACV), le recours aux énergies renouvelables (EnR*) et la production d’électricité sur place.
Tous les bâtiments neufs soumis à la réglementation, devront répondre à ces nouvelles exigences définies dans un arrêté ministériel paru en octobre 2016. Elles concerneront 4 catégories de bâtiments (maisons individuelles, immeubles collectifs, bureaux, autres bâtiments) et comprendront 4 niveaux « Énergie » et 2 niveaux « Carbone » possibles pour chacune d’entre elles.

Comment ces différents critères seront calculés ?
La RT 2012 s’appuie aujourd’hui sur le coefficient « Bbio » (besoins bioclimatiques) pour exprimer la qualité de conception du bâtiment (compacité, orientation, apports solaires, étanchéité à l’air…) et sur le coefficient « Cep » pour estimer les consommations d’énergie primaire des 5 usages réglementaires (chauffage, climatisation, eau chaude sanitaire, éclairage, auxiliaires électriques).
Ces deux pré-requis seront conservés et serviront de base à l’indicateur Bilan BEPOS qui fera le bilan entre les énergies consommées d’origine non-renouvelable et les énergies produites -consommées et/ou exportées- d’origine renouvelable.
Ce calcul incite à produire de l’électricité sur place (essentiellement par le biais de panneaux photovoltaïques) pour la consommer directement.

Et concernant les cibles « Carbone » ?
Le nouvel indicateur « Carbone » est une vraie révolution dans la conception des bâtiments. Jusqu’à présent, seuls les bâtiments faisant l’objet d’une certification environnementale (HQE, BREEAM…) le prenaient en considération.
À partir de 2018, toutes les constructions neuves soumises à la réglementation, devront s’y conformer. Alors mieux vaut ne pas attendre le dernier moment pour évaluer son empreinte carbone ! Elle traduit la qualité environnementale d’un bâtiment sur tout son cycle de vie : depuis le choix des matériaux de construction, en passant par le chantier jusqu’à sa fin de vie (estimée à 50 ans).
Cette analyse tend également à valoriser les matériaux recyclables et le fonctionnement en économie circulaire.

Quel sera le principal avantage accordé par ce label et la future réglementation qui en découlera ?
Il n’y aura, a priori, pas d’avantage fiscal mais aller chercher un label ou participer à l’expérimentation, c’est préparer le futur pour ne pas subir les choses lorsque la réglementation rentrera en application dans 1 à 2 ans.
En dehors du label E+C-, il existe tout de même un mécanisme proposé par les pouvoirs publics : un bonus de constructibilité pouvant aller jusqu’à 30 % sous certaines conditions (atteinte d’un certain niveau de performance énergétique et/ou environnementale).

* EnR : énergies renouvelables

Interview extrait de C_La Revue#2 « Construire responsable : les acteurs publics peuvent montrer la voie »